La démesure caractèrise Alexandre,figure aussi historique que mythique ,qui rallia les grecs,envahit l'egypte,fondit maintes cités gigantesques,soumit les perses,et surtout poursuivit inexorablement ses conquêtes au delà des terres connues ...
Dès lors comment conter le destin de ce dévoreur de monde autrement qu'avec une indéniable démesure.
Et de démesure,d'envergure et de folie,cet Alexandre en manque assez tristement.
C'est évident et en même temps relativement mensonger ...
Au titre de cette principale faiblesse,le grande première partie du film (jusqu'en Asie),est franchement laborieuse,et on a la genante sensation que malgré des paris risqués ,et largement revendiqués comme tels (le choix de préferer un profil psychologique plûtot qu'à un florilège guerrier,l'audaçe de ne rien dissimuler de la sexualité du héros,alors que la tendançe du genre est d'abord de jouer l'hypocrisie),l'incondescence d'Oliver Stone peine à s'évader de sa prison logistique,de son décorum luxueux,de sa profusion historique....
C'est franchement très beau,c'est mis en scène avec élégançe,c'est plutôt bien interpété (et parfois même de façon splendide,voir le remarquable et essentiel duo parental Val Kilmer/Anjelina Jolie,Phillippe/Olympias),mais c'est assez empesé,poli et ennuyeux,trop parlé et pas assez assené,pas assez brutal et racé....
Au delà de la sincérité des intentions Alexandre échoue presque complètement pendant près de 100 minutes à trouver un véritable rythme,et surtout surtout un réel souffle épique .
Dans cette ordres d'idée je ferais réferençe à une musique au pire pontifiante,au mieux transparente;diable quelle autre allure auraient pu avoir certaines visions de Stone si elles avaient été assaisonnées d'opéras baroques et caverneux ,genre Conan le barbare-excalibur,ce genre de thèmes qui semblent jaillir de la gorge d'un dieu cruel déplaçant hordes de guerriers et montagnes d'un revers de main ....
Ensuite comme Zorg j'ai particulièrement choqué par l'éllipse(presque) intégrale qui est faite sur les premières années de pouvoir d'ALexandre,qui par magie verse d'une scène à l'autre,de fils banni à pharaon ....
Soit mais quand même .
Enfin on peut raisonnablement espérer que le director's cut lavera cette infamie ....
Autre élément qui me gène aux entournures,la bataille de Gaugamèles:qui pour être fougueusement magistrale et estomaquante vue du ciel (de l'aigle),devient assez fouillie et même assez désagréable à hauteur d'homme .
Triste que Stone ait lui aussi fait preuve du désarroi scènique très à la mode qui consiste à coller la caméra à 50 cm des cuirasses,puis si possible la remuer le plus possible...
On plisse les yeux pour essayer de comprendre ce qui se passe,ou ne pas s'évanouir,et même les os broyés et les jugulaires génereusement sectionnées peinent à enthousiasmer .
En somme si le cahier des charges semble respecté (merde au bout d'une heure de film il fallait leur filer une bataille,du grain à moudre,à tous ces blaireaux);c'est assez palot .
Reste tout de même le moment assez spectaculaire oû la cavalerie d'Alexandre opère un assez formidable changement de cap,et charge .
A part ça .
Le traitement du personnage de Darius ,le roi perse,illustre à la perfection la touche,les obsessions de Stone,et permet d'orchestrer et de mieux comprendre pourquoi la dernère heure du métrage est d'une supériorité confondante :vivant ,Darius n'est rien d'autre qu'un prince arabe d'opérette au regard vachement mais alors vachement intense,ce n'est que mort,enveloppé de lambeaux et trainée dans la boue ,qu'il devient grand .
Voilà en quelque sorte pourquoi les dernières années du règne d'ALexandre,sa fuite en avant ininterrompue (et pas vraiment sa chute),semblent passionner beaucoup plus Oliver Stone .
Ce qui,oh putain,offre une toute autre gueule au film .
Colin Farell si tôt qu'il foule l'asie impose un drôle de charisme,il n'est plus l'icone,l'éphèbe et abandonne enfin cette invraisembable couronne blonde de Beach boy et adopte des cheveux longs et sales,et ce masque ...
ce masque,ce visage livide,ces yeux rougis par l'usure ,l'alcool,la facination pour un univers qu'il essaye de dompter pour mieux oublier ce qui de sa propre vie il ne maitrise pas,ses démons,un roi ethérée ou luçide voulant écraser puis réunir les peuples,un roi moins fou de pouvoir que de découvertes,un roi qui va mener ses troupes au dela de tout beaucoup trop loin sans doute,et qui récoltera comme joyaux,folie, mort,démesure ! .
La seconde partie du récit est à mon avis franchement exceptionelle,d'une intensité lyrique,baroque ,humaine foudroyante ,et atteint toute sa puissance dans la jungle indienne,au cours d'une lutte sanglante,barbare,délivrant avec cette fameuse scène de l'éléphant un indéniable pur morceau de bravoure épique...
Dans cette seconde partie,Stone ne se refuse rien,il mêle phantasmes et cauchemards,filtre l'image en rouge,sang,nous balançe au visage la poitrinne complètement renversante de Rosario Dawson ....jusquà un final enfin plein de grandeur et de décadençe .
Du très lourd .
Je suis donc déçu et transi par ce film ,schizophrénie d'un film trop vulgaire pour être brillant,trop brillant pour être vulgaire .
Un film qui dand un avenir proche et dans une nouvelle forme rallongée(souhaitons plutot plus exhaustive,plus personnelle),pourrait fuir ce label de grand film raté,pour n'être plus qu'un grand film .
A suivre,dans cette vie ou dans l'autre .
